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Décision N°C-008/09 du 14 décembre 2009
AFFAIRE : Recours des députés de l’UFC
Décision N°C-008/09 du 14 décembre 2009
LA COUR CONSTITUTIONNELLE,
Saisie par lettre en date du 03 novembre 2009, enregistrée au greffe de la Cour le même jour sous le N°003-G, lettre par laquelle les députés de l’Union des Forces de Changement (UFC) demandent à la Cour de constater l’irrégularité de la procédure d’adoption de la loi organique portant modification de la loi organique n°2004-021 du 15 décembre 2004 sur la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC) et de déclarer non conformes à la Constitution les articles 5, 26, 30, 31, 58, 60, 62, 63,65, et 67 ;
Vu la Constitution du 14 octobre 1992, notamment en son article 92 ;
Vu la loi n°2004/004 du 1er mars 2004 sur la Cour constitutionnelle ;
Vu le Règlement intérieur de la Cour, adopté le 26 janvier 2005 ;
Vu le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, adopté le 22 novembre 2007 ;
Considérant que les députés de l’Union des Forces de Changement contestent la procédure d’adoption de la loi organique modifiant la loi organique n°2004-021 du 15 décembre 2004 relative à la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC) votée par l’Assemblée nationale au cours de la quatrième séance de la deuxième session ordinaire de l’année 2009 d’une part, et sollicitent la déclaration d’inconstitutionnalité des articles 5, 26, 30, 31,58, 60, 62, 63, 65 et 67 de ladite loi organique d’autre part ;
Sur la procédure d’adoption de la loi organique en cause
Considérant que les requérants allèguent que « …au regard de la procédure législative de vote des textes, les propositions de loi ou les projets de loi ne sont soumis à la plénière de l’Assemblée nationale pour délibération et vote qu’après le dépôt du rapport de la commission permanente mixte ou spéciale saisie de l’étude du texte à discuter ;
Qu’il s’ensuit que le délai de quinze jours fixé par la Constitution ne peut courir qu’après le dépôt sur la table du bureau de l’Assemblée nationale du rapport d’étude de la loi adoptée en commission et destinée à être délibéré et voté par la plénière de l’Assemblée nationale » ;
Considérant que l’article 92, alinéa 1er de la Constitution du 14 octobre 1992 dispose que : « Les propositions ou projets des lois organiques sont soumis à la délibération et au vote de l’Assemblée nationale à l’expiration d’un délai de quinze jours après leur dépôt » ;
Que l’article 82, alinéa 10 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale précise que : « Les projets de loi et les propositions de lois sont, après l’annonce de leur dépôt, renvoyés à l’examen de la Commission compétente ou d’une commission spéciale de l’Assemblée nationale… » ;
Qu’il résulte de ces deux dispositions qu’il s’agit du dépôt des propositions et projets de loi et non du dépôt du rapport de la commission ayant examiné la proposition ou le projet de loi ;
Qu’ainsi, le délai de quinze jours commence à courir à partir de la date de dépôt de la proposition ou du projet de loi et qu’à l’expiration de ce délai, la proposition ou le projet de loi est susceptible d’être délibéré ou voté par la plénière de l’Assemblée nationale ;
Considérant que les requérants allèguent que « la commission des lois constitutionnelles et de la législation de l’Administration générale et la Commission du Développement économique et de l’Aménagement du territoire ont conjointement adopté leur rapport le 27 octobre 2009 ;
….qu’au regard de l’article 92 de la Constitution, la délibération et le vote de la loi, s’agissant d’une loi organique, ne peut intervenir qu’après 15 jours à compter du 28 octobre 2009 » ;
Que cette compréhension de l’article 92 de la Constitution du 14 octobre 1992 déplace le moment où commence à courir le délai de quinze jours du dépôt de la proposition ou du projet de loi vers le dépôt du rapport de commission ayant étudié la proposition ou le projet de loi ;
Qu’ainsi, l’interprétation faite par les requérants est contraire à la lettre de l’article 92 de la Constitution du 14 octobre 1992 en ce que le délai de quinze jours commence à courir à la date du dépôt de la proposition ou du projet de loi ;
Sur la constitutionnalité de l’article 5 de la loi votée
Considérant que l’article 5 de la loi votée est ainsi libellé : « la Haute Autorité comprend neuf (09) membres choisis sur la base de leur compétence et de la connaissance approfondie du secteur de la communication à raison de :
- Quatre (04 désignés par le Président de la République.
- Cinq (05) élus par l’Assemblée nationale dont deux (02) sur la liste proposée par les organisations les plus représentatives de journalistes et techniciens de la communication.
La désignation et l’élection des membres de la Haute Autorité doivent tenir compte du genre.
Les membres ainsi désignés doivent justifier d’au moins dix (10) années d’expérience professionnelle.
En dehors des membres élus sur la liste des organisations professionnelles, l’Assemblé nationale élit les autres membres suivant la procédure d’appel à candidature » ;
Considérant que les requérants soutiennent que «la modification de la loi organique sur la HAAC, comme le code électoral ou la loi sur le statut de l’opposition font partie des lois à caractère politique qui doivent être discutées et adoptées dans le cadre des réformes visant à consolider la démocratie, l’Etat de droit et la bonne gouvernance dans un esprit de large consensus comme il a été convenu dans l’Accord Politique Global du 20 août 2006 ;
Que ni le gouvernement, ni l’Assemblée qui sont interpelés par les dispositions politiques de l’Accord Politique Global n’ont recherché ce consensus national avant de modifier la loi organique sur la HAAC pour permettre la mise en place d’une HAAC qui assure par sa composition, l’Indépendance et l’impartialité de l’institution chargée par la Constitution de garantir et d’assurer la liberté et la protection de la presse et des autres moyens de communication de masse » ;
Considérant que la procédure législative prévue au titre II du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale ne prévoit pas la recherche du consensus pour le vote des lois ;
Que la recherche du consensus prévu par l’Accord Politique Global (APG) du 20 août 2006 ne constitue pas la procédure obligatoire d’adoption ou de vote des textes à l’Assemblée nationale ;
Qu’ainsi, la recherche de consensus n’ayant été prévue ni par la Constitution du 14 octobre 1992 ni par le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, elle ne saurait légalement être opposable au vote d’une loi conformément aux textes en vigueur ;
Considérant par ailleurs que l’article VII de la « Déclaration des principes sur la liberté d’expression en Afrique » de l’Union africaine évoqué par les requérants n’a pas de valeur juridique obligatoire et qu’elle ne saurait donc être opposée à la procédure législative ;
Sur la demande de déclaration d’inconstitutionnalité des articles
26, 30, 31, 58, 60, 63, 65 et 67
Considérant que les requérants demandent à la Cour de « dire et juger ces articles… non conformes à la Constitution du 14 octobre 1992 avec toutes les conséquences de droit. » ;
Mais, considérant qu’avant que la Cour n’ait à statuer sur le recours, le Président de la République a, conformément aux dispositions de l’article 67 de la Constitution, demandé une deuxième lecture de la loi attaquée ;
Qu’après le vote de ladite loi organique, la Cour, a par décision N°C-007/09 du 09 décembre 2009, déclaré la nouvelle loi conforme à la Constitution ;
Qu’en conséquence, les griefs soulevés contre les articles 26, 30, 31, 58, 60, 63, 65 et 67 sont devenus sans objet.
DECIDE
Article 1er : Le délai de quinze jours commence à courir à partir de la date de dépôt de la proposition ou du projet de loi ;
Article 2 : La recherche de consensus ne peut empêcher l’application de la procédure législative prévue par la Constitution et le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale ;
Article 3 : Les griefs soulevés contre les articles 26, 30, 31, 58, 60, 63, 65 et 67 sont devenus sans objet ;
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l’Union des Forces de Changement (UFC), à l’Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République togolaise.
Délibérée par la Cour en sa séance du 14 décembre 2009 au cours de laquelle ont siégé : MM. Aboudou ASSOUMA, Président ; Mama-Sani ABOUDOU-SALAMI, Kouami AMADOS-DJOKO, Chef Améga Yao Adoboli GASSOU IV, Mme Ablanvi Mèwa HOHOUETO, Mipamb NAHM-TCHOUGLI, Arégba POLO et Koffi TAGBE.
POUR EXPEDITION CERTIFEE CONFORME
Lomé, le 24 avril 2010
Le Greffier en Chef,
Me Mousbaou DJOBO
Décision N°C-008/09 du 14 décembre 2009