DECISION N°C-009/19 DU 29 juillet  2019

[featured_image]
Télécharger
Download is available until [expire_date]
  • Version
  • Télécharger 0
  • Taille du fichier 12.00 KB
  • Nombre de fichiers 1
  • Date de création 19 juin 2023
  • Dernière mise à jour 20 juin 2024

DECISION N°C-009/19 DU 29 juillet  2019

AFFAIRE : Exception d’inconstitutionnalité(Ministère public, KODJO GarbaGnambic/ Fana Mawinesso KADOASSO
DECISION N°C-009/19 DU 29 juillet  2019
« AU NOM DU PEUPLE TOGOLAIS »
LA COUR CONSTITUTIONNELLE, 
Par lettre N° 121/19/CA/ATPIL-CAB.P en date du 10 juillet 2019, enregistrée au greffe de la Cour le même jour sous le N° 023-G, le président du tribunal de première instance de première classe de Lomé, en application de l’article 104, alinéa 8 de la Constitution, transmetà la Cour « le dossier de la procédure Ministère public contre Fana Mawinesso KADOASSO poursuivi pour diffusion de fausses novelles, diffusion et non-respect de la déontologie en matière de presse », afin que celle-ci se prononce sur l’exception d’inconstitutionnalité soulevée par maître Kofi Sylvain MENSAH ATTOH, conseil du prévenu.
Vu la Constitution du 14 octobre 1992 en son article 104;
Vu la loi organique N°2004-04 du 1er mars 2004 sur la Cour Constitutionnelle ;
Vu le règlement intérieur de la Cour, adopté le 15 février 2014 ;
Vu l’ordonnance N°015/2019/CC-P du 10 juillet 2019 du Président de la Cour portant  désignation de rapporteur ;
Vu les pièces du dossier ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
Considérant que l’article 104, alinéa 8 de la Constitution énonce expressément que : « Au cours d’une instance judiciaire, toute personne physique ou morale peut ‘in liminelitis’ devant les cours et tribunaux, soulever l’exception d’inconstitutionnalité d’une loi. Dans ce cas, la juridiction sursoit à statuer et saisit la Cour Constitutionnelle » ;
Considérant que le président du tribunal de première instance de Lomé a joint à sa lettre de transmission une copie du jugement avant dire droit N° 859 du 19 juin 2019, par lequel le Tribunal saisit la Cour constitutionnelle « afin qu’elle se prononce sur la conformité des dispositions de l’article 497 du nouveau code pénal avec l’article 26 de la Constitution du 14 octobre 1992 » ;
Qu’en conséquence, la requête transmise par le  tribunal de première instance de Lomé est recevable ;
Considérant que dans l’affaire Ministère public contre Fana Mawinesso KADOASSO, maître MENSAH ATTOH, conseil du prévenu a, dans ses conclusions exceptionnelles en date du 16 mai 2019, soulevé l’exception d’inconstitutionnalité de l’article 497de la loi N° 2015-010 du 24 novembre 2015 portant code pénal, modifiée par la loi N° 2016-027 du 11 octobre 2016 ;
Considérant que, dans ses conclusions, maître MENSAH ATTOH invoque l’article 26 de la Constitution du 14 octobre 1992 quidispose : «  La liberté de presse est reconnue et garantie par l'Etat. Elle est protégée par la loi.
Toute personne a la liberté d'exprimer et de diffuser par parole, écrit ou tous autres moyens, ses opinions ou les informations qu'elle détient, dans le respect des limites définies par la loi.
La presse ne peut être assujettie à l'autorisation préalable, au cautionnement, à la censure ou à d'autres entraves. L'interdiction de diffusion de toute publication ne peut être prononcée qu'en vertu d'une décision de justice. » ;
Qu’il affirme que c’est pour protéger la liberté d’expression et en garantir l’exercice que la loi N°98-004 du 11 février 1998, modifiée par la loi N° 2002-026 du 25 septembre 2002, modifiée par la loi N°2004-015 du 27 août 2004,portant code de la presse et de la communication, a dépénalisé les délits de presse ;
Qu’il soutient enfin que l’article 497 de la loi N° 2015-010 du 24 novembre 2015 portant code pénal, modifiée par la N° 2016-027 du 11 octobre 2016, qui prévoit encore des peines d’emprisonnement pour des délits de presse « est contraire à l’article 26 de la Constitution togolaise du 14 octobre 1992 qui protège la liberté d’expression. » ;
Considérant que l’article 497 du code pénal dispose que : « la publication, la diffusion ou la reproduction, par quelque moyen que ce soit, de nouvelles fausses, de pièces fabriquées, falsifiées ou mensongèrement attribuées à des tiers, lorsque faites de mauvaise foi, elle trouble la paix publique ou est susceptible de la troubler, est punie d’un peine d’emprisonnement de six (6) mois à deux (2) ans et d’une amende de cinq cent mille (500 000) FCFA à deux millions (2000 000) FCFA ou de l’une de ces deux peines.
L’auteur des nouvelles fausses visées à l’article précédent est puni d’une peine d’un (1) an à trois (3) ans d’emprisonnement et d’un million(1000000) à trois millions (3000000) CFCA d’amende ou de l’une de ces deux peines. » ;
Considérant que maitre MENSAH ATTOH prétend que cet article 497 de la loi N° 2015-010 du 24 novembre 2015 portant code pénal n’est  pas conforme à l’article 26 de la Constitution ;
Considérant que l’article 26 dispose, en son alinéa 1er, que « la liberté de presse est reconnue et garantie par l’Etat. Elle est protégée par la loi »;
Considérant que la garantie que l’Etat apporte à la liberté de la presse et sa protection par la loi justifient l’adoption de la loi N°98-004 du 11 février 1998, modifiée par la loi N° 2002-026 du 25 septembre 2002, modifiée par la loi N°2004-015 du 27 août 2004 portant code de la presse et de la communication ;
Que c’est ce qui explique la coexistence de la loi N°2015- 010 du 24 novembre 2015 portant code pénal, modifiée par la loi N°2016-027 du 11 octobre 2016, notamment en son article 497 et la loi N° 2002-026 du 25 septembre 2002, modifiée par la loi N°2004-15 du 27 août 2004 qui, bien que réglementant la même infraction, ont adopté des mesures pénales différentes ;
Considérant que la loi N°2015-010 du 24 novembre 2015 portant code pénal est une loi générale alors que la loi N° 2002-026 du 25 septembre 2002 portant code de la presse et de la communication  est une loi spéciale ;
Qu’il est généralement admis que les lois spéciales doivent  être interprétées strictement, de façon à  ne pas en étendre la portée au-delà  du domaine dans lequel les textes qui les prévoient les ont cantonnées;
Qu’en cas de conflit entre une loi générale et une loi spéciale, le principe est que les lois spéciales excluent les lois générales dans les limites de leur domaine d'application ;
Considérant, en outre, que lorsque la loi spéciale est postérieure à  la loi générale avec laquelle elle interfère, elle y déroge évidemment ;
Qu’en revanche, lorsque la loi nouvelle est plus générale que la loi spéciale préexistante, l’abrogation de la loi spéciale doit être explicite ; que,  dans le cas contraire, la loi spéciale subsiste et l'emporte, dans son domaine strict, sur la loi générale plus récente ;
Considérant que, dans l’ordonnancement juridique, la loi N°98-004 du 11 février 1998, modifiée par la loi N° 2002-026 du 25 septembre 2002, modifiée par la loi N°2004-015 du 27 août 2004 portant code de la presse et de la communication est toujours en vigueur ; qu’elle est l’outil de travail, entre autres institutions, de la Haute  Autorité  de  l’Audiovisuel  et  de  la   Communication (HAAC), chargée  de  garantir  et  d’assurer  la  liberté  de  la  presse  et   la protection de la presse et des autres moyens de communication de masse tel que prévu par la Constitution ; qu’elle demeure donc applicable;
En conséquence,
DECIDE :
Article 1er : La requête de maître MENSAH ATTOHtransmise par le président du tribunal de première instance de Lomé est recevable.
Article 2 :L’article497 de la loi N° 2015-010 du 24 novembre 2015 portant code pénal, modifiée par la loi N° 2016-027 du 11 octobre 2016 est conforme à la Constitution.
Article 3 : La loi N°98-004 du 11 février 1998, modifiée par la loi N° 2002-026 du 25 septembre 2002, modifiée par la loi N°2004-015 du 27 août 2004 portant code de la presse et de la communication est toujours en vigueur.
Article 4:La présente décision sera notifiée au président du tribunal de première instance de Lomé et publiée au Journal officiel de la République togolaise.
Délibérée par la Cour en sa séance du 29 juillet 2019 au cours de laquelle ont siégé : MM les Juges Aboudou ASSOUMA, Président ; Maman-Sani ABOUDOUSALAMI,Kouami AMADOS-DJOKO,Mipamb NAHM-TCHOUGLI, Arégba POLO, Koffi TAGBE et Koffi AHADZI-NONOU.
Suivent les signatures
POUR EXPEDITION CERTIFIEE CONFORME
Lomé, le 18 décembre 2019
Le Greffier en Chef
Me Mousbaou DJOBO
DECISION N°C-009/19 DU 29 juillet  2019

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Retour en haut