AVIS N°AV-001/08 DU 20 JUIN 2008

LA COUR CONSTITUTIONNELLE,

AFFAIRE : Demande du Président de l’Assemblée nationale

Saisie par lettre n° 2008-0194/PR en date du 28 mai 2008, adressée au Président de la Cour constitutionnelle et enregistrée au greffe sous le n° 004-G le 29 mai 2008, par laquelle le Président de la République demande à la Cour de lui donner « la plus exacte interprétation de l’article 3 de la Constitution togolaise relatif aux armoiries ainsi que la description claire des armoiries qui correspondent à cette disposition » ;

Vu la Constitution du 14 octobre 1992 ;

Vu la loi organique n° 2004-004 du 1er mars 2004 ;

Vu le Règlement intérieur de la Cour constitutionnelle ;

Vu la lettre du Président de la République sus-citée par laquelle il constate « l’utilisation concomitante de deux types d’armoiries » créant « un sérieux doute sur l’authenticité des documents qui les portent » ;

Considérant que l’article 3, alinéa 5 de la Constitution de la IVè République togolaise dispose : «… Les armoiries de la République togolaise sont ainsi constituées :

–  Ecu d’argent de forme ovale et à la bordure de sinople, en chef l’emblème national, deux drapeaux adossés et devise sur banderole ; en cœur de sable les initiales de la République Togolaise sur fond d’or échancré ; en pointe, deux lions de gueules adossés.

– Les deux jeunes lions représentent le courage du peuple togolais. Ils tiennent l’arc et la flèche, moyen de combat traditionnel, pour montrer que la véritable liberté du peuple togolais est dans ses mains et que sa force réside avant tout dans ses propres traditions. Les lions debout et adossés expriment la vigilance du peuple togolais dans la garde de son indépendance, du levant au couchant. » ;

Que ledit article est une reprise de l’article 1er de la loi n° 62-10 du 14 mars 1962 définissant pour la première fois les armoiries de la République, le sceau de l’Etat et les sceaux, timbres et cachets des autorités publiques ;

Que les mêmes dispositions ont été reconduites par les différentes constitutions de la République togolaise, à l’exception de la Constitution du 9 janvier 1980 ;

Considérant que l’article 3, alinéa 5 de la Constitution en vigueur est l’objet d’interprétations divergentes donnant lieu à l’existence de deux types d’armoiries utilisées indifféremment sur les documents officiels ; que cette situation nécessite une relecture desdites dispositions ;

Considérant que l’étude des armoiries et leur interprétation ne peuvent être appréhendées par les seules méthodes d’interprétation juridique ou constitutionnelle ; qu’elles commandent de recourir à une science particulière appelée l’héraldique, science qui étudie les armoiries et qui en définit les méthodes d’interprétation technique et la transcription visuelle de leur blasonnement c’est-à-dire la description théorique dans un langage technique ;

Qu’une approche descriptive des armoiries ne peut se faire sur la simple compréhension littérale des mots, concepts et symboles contenus dans une description juridique ; qu’elle doit s’appuyer sur la technique héraldique, sur les méthodes d’interprétation du texte qui la contiennent et qui la garantissent ;

Que les couleurs héraldiques des armoiries désignent l’attribut coloré d’un champ ou d’un fond ; que chaque couleur a un nom héraldique conventionnel qu’il est important de connaître pour procéder au déchiffrement correct ;

Considérant que le premier tiret blasonne les armoiries et que le second tiret en donne le sens ; qu’il convient de s’attacher ici au blasonnement du premier tiret ;

Considérant que le blasonnement du premier tiret de l’article 3, alinéa 5 donne la description suivante :

I- Ecu d’argent de forme ovale en bordure de sinople = Ecu à fond blanc de forme ovale à la bordure verte ;

L’écu est le support physique du blason. Il est subdivisé en trois régions :

  • le chef (en haut)
  • le cœur (au milieu)
  • la pointe (en bas)

IIEN CHEF

II- 1. En chef l’emblème national, deux drapeaux adossés = en haut dans le premier tiers supérieur de l’écu, l’emblème national, deux drapeaux placés dos à dos ;

II- 2. Devise sur banderole = la devise inscrite sur une petite pièce d’étoffe fixée à une hampe ;

III- EN CŒUR

III- 1. En cœur de sable les initiales de la République Togolaise = Au milieu, en couleur noire, les initiales de la République Togolaise (RT) ;

III- 2. Sur fond d’or = Sur un fond de couleur jaune ;

III-3. Echancré = objet dont les bords présentent des dentelures évidées en forme de croissant, les pointes dirigées vers l’extérieur ; ces dentelures se répètent de manière régulière sans variation ;

IV- EN POINTE

En pointe deux lions de gueules adossés = en bas, dans le tiers inférieur, deux lions, de couleur rouge, adossés ;

Qu’ainsi, de l’analyse et de l’interprétation faites de l’article 3 alinéa 5, 1er tiret de la Constitution, il ressort la traduction suivante :

« Ecu à fond blanc (d’argent) de forme ovale et à la bordure verte (de sinople), dans le premier tiers supérieur de l’écu (en chef) l’emblème national, deux drapeaux placés dos à dos (adossés) et la devise inscrite sur une petite pièce d’étoffe fixée à une hampe (banderole) ; au milieu (en cœur) en couleur noire (de sable) les initiales de la République Togolaise (RT) sur un fond jaune (d’or), dont les bords présentent des dentelures évidées en forme de croissant, les pointes dirigées vers l’extérieur (échancré) ; dans le tiers inférieur de l’écu en bas (en pointe) deux lions rouges (de gueules) dos à dos (adossés) » ;

Considérant que les armoiries reproduites et comportant un soleil ou un hexagone ne sont pas conformes à l’article 3, alinéa 5, 1er tiret de la Constitution togolaise ;

Que, eu égard à ce qui précède, les armoiries de la République Togolaise blasonnées à l’article 3, alinéa 5, premier tiret de la Constitution de la IVè République doivent être représentées comme ci-dessous :

Délibérée par la Cour en sa séance du 20 juin 2008 au cours de laquelle ont siégé : MM. Aboudou ASSOUMA, Président ; Mama-Sani ABOUDOU-SALAMI, Kouami AMADOS-DJOKO, Chef Améga Yao Adoboli GASSOU IV, Mme Ablanvi Mèwa HOHOUETO, Mipamb NAHM-TCHOUGLI, Lucien Bébi OLYMPIO, Arégba POLO et Koffi TAGBE, membres.

AVIS N°AV-001/08 DU 20 JUIN 2008

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