<< AU NOM DU PEUPLE TOGOLAIS >>
AFFAIRE : Requête de Monsieur le Président
de l’Assemblée Nationale
LA COUR CONSTITUTIONNELLE,
Saisie par lettre n°0038/2002/ANT/CAB/PA en date du 05 mars 2002 déposée et enregistrée au greffe de la Cour le 06 du même mois sous le n° 004-G par laquelle Monsieur Ouattara Fambaré NATCHABA, Président de l’Assemblée Nationale, demande à la Cour de constater la non promulgation, conformément à l’article 67 de la Constitution de la IVème République, de la loi électorale du 05 avril 2000 modifiée par l’Assemblée Nationale le 08 février 2002 ;
Vu la Constitution du 14 octobre 1992, notamment en ses articles 67, 99 et 104 ;
Vu la loi organique n°97-01 du 08 janvier 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle en son article 35 ;
Vu le règlement intérieur de la Cour adopté le 19 mai 1997 ;
Vu la loi électorale n°2000-007 du 05 avril 2000, ensemble avec les modifications qui y ont été apportées par l’Assemblée Nationale en sa deuxième session extraordinaire du 08 février 2002 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
Considérant que le requérant expose que l’Assemblée Nationale, en sa séance plénière du 08 février 2002 de sa deuxième session extraordinaire, a adopté la loi portant modification de la loi n°2000-007 du 05 avril 2000 portant code électoral ; que conformément à l’article 67 al. 1er de la Constitution, cette loi aurait dû être déjà promulguée par le Président de la République ; mais que jusqu’au jour de sa requête, celui-ci ne l’a pas encore fait et n’a non plus saisi l’Assemblée Nationale pour une nouvelle délibération ; que face à cette situation, et ce conformément aux articles 67 al. 2 de la Constitution, 105 du règlement intérieur de l’Assemblée Nationale et 34 de la loi organique n°97-01 du 08 janvier 1997 de la Cour Constitutionnelle, il demande que la Cour constate la non promulgation de ladite loi ;
Considérant que le Président de l’Assemblée Nationale invoque ainsi trois textes au soutien de sa requête : l’article 67 de la Constitution du 14 octobre 1992, l’article 34 de la loi organique et l’article 105 du règlement intérieur de l’Assemblée Nationale ;
Considérant que le premier dispose que «Le Président de la République promulgue les lois dans les quinze (15) jours qui suivent la transmission au Gouvernement de la loi définitivement votée par l’Assemblée Nationale ; pendant ce délai, il peut demander une nouvelle délibération de la loi ou de certains de ses articles ; la nouvelle délibération ne peut être refusée. A défaut de promulgation dans les délais requis, la loi entre automatiquement en vigueur après constatation par la Cour constitutionnelle.» ;
Considérant que le deuxième texte invoqué, l’article 34 de la loi organique dispose : «En cas de conflit entre les institutions de l’Etat, le Président de la République ou le Président de l’Assemblée Nationale saisit la Cour Constitutionnelle.» ; que ce texte donne, à l’évidence, compétence à la Cour Constitutionnelle pour régler les différends entre les institutions de l’Etat et précise les autorités habilitées à la saisir ;
Considérant plutôt qu’il s’agit, en l’espèce, d’une question relative à la constatation de la non promulgation d’une loi, l’article 34 ne saurait recevoir application ; qu’il suit qu’il doit être écarté et remplacé par l’article 35 de la même loi organique qui dispose que : «A défaut de promulgation dans les délais prévus par l’article 67 al. 1er de la Constitution, la Cour Constitutionnelle constate la non promulgation dans un délai de huit (8) jours à la demande du Président de l’Assemblée Nationale. Dans ce cas, la loi porte la date de la constatation par la Cour et entre automatiquement en vigueur.» ;
Considérant que le troisième, l’article 105 du règlement intérieur de l’Assemblée Nationale dispose que : «Lorsqu’à l’expiration du délai de quinze jours prévu pour la promulgation, il n’y a ni promulgation ni demande de seconde lecture par le Président de la République, le Président de l’Assemblée Nationale saisit la Cour Constitutionnelle aux fins de constater la non promulgation de la loi.» ;
Considérant que la saisine de la Cour par le Président de l’Assemblée Nationale telle que réglée par l’article 35 de la loi organique sus-cité et corroboré par l’article 105 du règlement intérieur de l’Assemblée Nationale est régulière ; qu’il y a donc lieu de déclarer la requête recevable ;
Considérant que la promulgation d’une loi définitivement votée constitue une prérogative réservée au Président de la République ; que conformément à l’article 67 al 1er de la Constitution, il l’exerce dans les quinze jours qui suivent la transmission de ladite loi au gouvernement ;
Considérant qu’il est constant qu’aucune demande de nouvelle délibération n’a été introduite par le Président le la République ; qu’ainsi le délai n’a pas été suspendu ;
Considérant que la loi modificative a été votée le 08 février 2002 par l’Assemblée Nationale et transmise le même jour au Président de la République ;
Considérant que le délai de quinze jours courait donc du 09 février 2002 pour expirer le 25 février 2002, le premier jour 08 février et le dernier jour samedi 23 février et le dimanche 24 février, jours non ouvrables, n’étant pas comptés ;
Considérant qu’à l’expiration dudit délai, la promulgation n’est pas intervenue ; qu’ainsi les dispositions de la Constitution n’ont pas été respectées ;
Considérant, en conséquence, qu’il y a lieu de constater que la loi, objet de la requête, n’a pas été promulguée :
DECIDE :
Article premier : Constate que la loi adoptée le 08 février 2002 par l’Assemblée Nationale portant modification de la loi n°2000-007 du 05 avril 2000 portant code électoral n’a pas été promulguée conformément à l’article 67 de la Constitution du 14 octobre 1992.
Article 2 : Dit que ladite loi portera comme date de promulgation la date de la présente décision et entrera automatiquement en vigueur.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au Président de la République, au Président de l’Assemblée Nationale, au Premier Ministre et publiée au Journal Officiel de la République togolaise.
Délibérée par la Cour en sa séance du 12 mars 2002 au cours de laquelle ont siégé : Monsieur Atsu-Koffi AMEGA, Président, Messieurs les Juges : Mama-Sani ABOUDOU-SALAMI, AMADOS-DJOKO Kouami, APEDO Kouami Emmanuel, Aboudou ASSOUMA et Kué Sipohon Frank GABA.